27 janvier 2011
La disparition de Michèle nous a plongé dans une peine immense.
Celle que l’on ressent à la perte d’une collègue avec laquelle nous avons cheminé durant tant d’années.
Mais surtout d’une amie très chère avec laquelle nous avons tant partagé.
De l’enthousiasme, de l’espoir, des déceptions parfois et des valeurs fortes.
Nous savions qu’elle luttait depuis longtemps contre la maladie, mais nous ne pouvions pas -nous ne voulions pas- imaginer une fin aussi brutale tant elle était pour nous tous symbole de courage, de détermination, et de force de caractère.
Elle est partie comme elle a vécu, avec dignité courage et modestie.
Cette modestie justement et cette simplicité qui lui faisait refuser les honneurs et les louanges, considérant que tout ce qu’elle faisait, les petites et les grandes choses, c’était naturel !
Mais aujourd’hui, au-delà de la peine que nous ressentons tous, nous sommes réunis pour lui rendre l’hommage qu’elle mérite.
Née à Paris en 1945, Michèle fait des études de psychologie à Lille de 1966 à 1968, puis elle entre à la Fondation Jeunesse Feu Vert, au service de prévention Paris en juillet 1970 comme psychologue faisant fonction d’éducatrice spécialisée.
Michèle devient directrice adjointe du Service en 1981.
Compte tenu de ses compétences professionnelles, de son expérience, de son attachement au département de Seine-Saint Denis où elle vit, la Fondation, sollicitée par le Conseil Général, lui confie, en 1995, la création d’un service de prévention à Epinay-sur-Seine et à l’Ile-Saint-Denis.
En dix ans, ce service va s’étendre à Saint-Ouen, Villetaneuse et à La Courneuve, passant de 10 à 50 salariés !
Toujours du côté des plus faibles, Michèle vivait au quotidien ses engagements contre l’injustice sociale.
Elle le vivait, l’incarnait dans son quotidien professionnel, dans sa militance politique de communiste, dans son engagement syndical, mais surtout dans sa relation avec chacun.
Exigeante, généreuse et fidèle, Michèle ne cessait d’expliquer combien la dureté des contextes de vie était déstructurante pour les individus.
Son travail de terrain exprimait un combat permanent, comme une humble réponse pour changer un système qui détruit, les jeunes et les familles les plus fragiles.
Psychologue de formation, elle détestait le langage « alambiqué » des experts.
D’une voix claire et directe, elle n’allait jamais par quatre chemins pour aborder les questions qui la préoccupaient ou pour dire ce qu’elle pensait !
Soutenant sans relâche le champ de la prévention spécialisée, elle voulait « faire avec les jeunes », les aider, les protéger, être un point de repère ou un guide parfois, être toujours aux cotés des familles, des habitants des quartiers.
Elle avait le souci et l’ambition de mener les projets en s’appuyant sur ses équipes et sur des dynamiques collectives par exemple avec les associations de jeunes ou d’habitants.
Là, dans ce département de la Seine-Saint-Denis, où les difficultés sont grandes pour la population et surtout pour les jeunes, Michèle a transmis à de nombreux professionnels sa vision de l’éducation, du travail dans la rue, sa conception du travail d’éducateur, sans doute un peu éloignée de la technicité d’aujourd’hui !
Michèle avait compris que l’identité populaire s’est transformée mais demeure, s’affichant aujourd’hui sous d’autres formes que ce soient :
- avec les groupes de rap qui scandent « la banlieue bouge ! »,
- le slam de Grand Corps Malade,
- ou de Tata MILOUDA, présente lors de son départ à la retraite. Elle était si émue lorsque cette femme d’origine marocaine racontait avec brio la conquête de sa liberté en tant que femme.
Elle pensait sans doute aussi au Maghreb, auquel elle était si attachée.